L’AMOUR N’EST PAS SI COMPLIQUE / EL AMOR NO ES TAN COMPLICADO
L’amour n’est pas si compliqué / El amor no es tan complicado
S’il est possible de croire en des terres aimantes, en des lieux sans conflits, l’amour est cet espace vierge encore. In-
nocent. De l’enfance. De l’art. L’enfance de l’art est telle que l’enfance de l’amour, et le monde qui l’accueille n’en est
pas à son dernier repas de cannibales*. Le geste de créer, d’animer le temps, d’enfreindre l’espace, est d’amour pour
le temps, d’amour pour l’espace.
Le mouvement n’est-il pas d’amour pour le corps ? L’immobilité n’est-elle pas la mort ? Voir n’est-il pas d’amour pour
les yeux ? Le merveilleux ne l’est-il pas d’amour pour ce regard qui le transcende ? L’arabesque n’est-il pas d’amour
pour l’air ? L’espace ne les contient-ils pas, et l’arabesque et l’amour, dans le plus grand des secrets ? Le bruit n’est-il
pas d’amour pour la musique, les ondes ? La musique n’est-elle pas la plus charmante des bruits, des ondes ? L’image
n’est-elle pas d’amour pour la surface ? Le rêve n’est-il pas reconnaissant, amoureux de l’image qui l’a engendré ? Le
mot n’est-il pas d’amour pour l’imaginaire ? L’esprit n’est-il pas leur sublime esclave ? S’il est des gestes humains sans
effet de guerres, en dehors de toute stratégie de destruction individuelle, collective ou massive, sans frontières pour
couper des territoires, pour couper des pays ; sans limites pour séparer des vies, pour déplacer des peuples entiers…
S’il est encore un lieu de sentiments exacerbés, de pleurs inouïs ; sans attentat à la carte, sans massacre à la queue
leu leu, sans génocide programmé, c’est encore le lieu du sublime, de l’art, du beau. Nous aurions beau tenter l’amour,
nous aurions beau tenter d’aimer partout, l’espace de l’art est là où l’amour est le plus beau, le plus merveilleux, le plus
sublime, le plus tendre. L’espace de l’art est d’amour. L’amour y est vierge, continent. Il n’y a d’art que d’amour.
Guy Régis Junior
Directeur artistique